Rouvrir le garage de son père, apprendre un métier nettement moindre à ses qualifications de diplômée du supérieur, défier une mentalité sexiste et s’imposer via son mérite et son sérieux : autant de preuves que Baya a dû réussir pour gagner sa vie dignement.
Tunis (dpa) – La Tunisienne Baya Ben Younes, ingénieure en électromécanique, de formation cycliste à Sfax (Centre), a réussi à forcer l’étonnement et l’admiration de son entourage, aussi bien féminin que masculin, en exerçant le métier de son père, décédé depuis deux ans.
Cela fait deux ans que la jeune femme travaille comme cycliste pour subvenir à ses besoins ainsi qu’à ceux de sa mère. « Je suis issue d’une famille modeste dont j’ai été la fille unique. Mon père travaillait comme cycliste. Il louait un garage pour entretien pneumatique. J’ai toujours été gâtée vu que j’étais l’unique progéniture de mes parents. J’ai réussi ma scolarité et mon parcours estudiantin, décrochant en 2012 mon diplôme supérieur d’ingénieure en électromécanique », raconte Baya, dans un entretien avec « la Presse magazine » de Tunisie, publié le 10 janvier.
Comme pour bon nombre de jeunes diplômés, Baya a tenté sa chance en déposant des demandes d’emploi dans plusieurs institutions et sociétés nationales, mais elle n’a pas pu accéder à un emploi adéquat. Le 2 avril 2018, le père de Baya décède, laissant derrière lui une famille à nourrir et deux loyers à payer, à savoir le loyer de la maison et celui du garage.
Sept mois se sont écoulés non sans difficulté et inquiétude, après quoi sa mère lui avait suggéré d’ouvrir le garage et de l’exploiter comme le faisait son père. Baya a donc retroussé ses manches, rouvert le garage d’entretien pneumatique et entamé une nouvelle étape de sa vie. Elle avait embauché un apprenti qualifié, qui l’avait initiée à ce métier jusque-là méconnu par la jeune femme. Et en dépit des caractéristiques plutôt masculines du métier de cycliste, Baya s’était vite acclimatée au jargon, au matériel, ainsi qu’aux étapes du diagnostic, rapporte la même source.
Rouvrir le garage de son père, apprendre un métier nettement moindre à ses qualifications de diplômée du supérieur, défier une mentalité sexiste et s’imposer via son mérite et son sérieux : autant de preuves que Baya a dû réussir pour gagner sa vie dignement et subvenir à ses besoins et à ceux de sa mère, a-t-on fait remarquer.
Aujourd’hui et malgré la cherté de la vie et l’incapacité budgétaire de Baya à renforcer les équipements de son projet, elle affirme qu’elle ne baissera jamais les rideaux du garage d’entretien pneumatique ! « J’ai appris à aimer ce métier au fil des ans. Quoi qu’il advienne, ce garage restera ouvert aux clients surtout qu’il porte toujours le nom de mon père», confie-t-elle.
Baya exhorte les jeunes sans emploi – diplômés ou non- à ne pas réfuter les métiers impliquant un effort physique, voire mal rémunérés. Elle va plus loin dans sa critique des récalcitrants : « Il est temps que les mentalités changent et que les jeunes assument des responsabilités. Personnellement, je suis à la recherche d’un apprenti depuis deux mois, en vain. Pourtant, les chômeurs prennent place dans les cafés et y restent à longueur de journée » déplore- t-elle.
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